Page 11 - N°. 24 / DECEMBRE 2019
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CONTRIBUTION








           Selon des études plus ou moins récentes  , les pertes en
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           taxons cultivés en Algérie sont de 51 à 66% et celle des
           animaux autour de 56%. Ainsi, les céréales ont vu la
           disparition de 64% des variétés locales à la faveur de
           l’introduction de variétés dites à rendement élevé et   les
           espèces maraichères ont enregistré pas moins de 64% de
           perte  de  taxons.  Pour  l’arboriculture,  l’érosion
           génétique est en train de réduire fortement la diversité
           des espèces emblématiques que sont l’olivier, le figuier
           et l’abricotier. Pour les ressources animales d’élevage, la
           race bovine Brune de l’Atlas (Guelmoise) se voit rétrécir   La vigne est sans doute l’espèce qui a connu la plus importante
           devant l’introduction des races améliorées de même   régression avec la disparition de nombreux cépages. En 2000 le
           que les races ovines steppiques de plus en plus noyées   parc viticole algérien comptait 96 cépages et actuellement
           par des croisements incontrôlés. Les souches de la race   l’ITAFV disposerait de 79 cépages dont 62 de table et 17 de cuve
           équine barbe connaissent aussi une perte de l’ordre de   et de 7 porte-greffes. La disparition du savoir-faire et le défaut
           60%.                                              d’encadrement de la viticulture ont conduit à l’abandon des

           En céréaliculture, 4 variétés de blé dur sur 20   parcs à bois et des champs de pieds-mères. Pour des raisons de
           représentent 90% des semences commercialisées dont   restructuration  et des besoins d’urbanisation, des collections
           Vitron et Waha « S », 2 variétés ayant disparu entre 1996   entières de cépages ont disparu des fermes pilotes (Chebli, SBA)
           et 2011 (Duria et Ouarsenis) et les variétés Hiddab   et de l’INA.
           (HD1220) et Arz (Beni Slimane) représentent à elles   En dehors de l’environnement naturel qui interfère
           seules 94% des blés tendres. Les variétés Saida et   principalement par les aspects climatiques, les raisons directes de
           Tichedret dominent les semences d’orge.           l’érosion génétique dans l’agriculture algérienne sont liées à
           Les   légumes   secs,   en   conséquence   d’un   l’environnement structurel  des  activités  agricoles  et d’élevage
           désintéressement prolongé, ont connu une forte    non seulement le segment de production mais aussi en amont et
           déperdition de matériel végétal local et introduit si bien   en aval. L’idée de sauvegarder la diversité biologique, combien
           qu’il serait difficile de relancer cette filière sur la base de   même  elle  jouit  de  l’intérêt des  pouvoirs  publics,  n’est  pas
           ce patrimoine perdu.                              entourée sur le plan opérationnel des garanties de réussite. Sur le
                                                             plan institutionnel, l’Algérie s’est dotée progressivement
           Pour les  cultures industrielles,  hormis la tomate,  la   d’institutions, de structures techniques et de textes qui devraient,
           plupart des cultures ont disparu pour des raisons   théoriquement, traduire la stratégie de la communauté nationale
           structurelles.                                    sur la question. Mais il reste qu’un renforcement des capacités est
                                                             primordial en matière de recensement, de conservation et de
                                                             multiplication du matériel végétal et animal autochtone, de
                                                             soutien à la production de races, de variétés et de cultivars
                                                             locaux, de contrôle rigoureux de la mobilité du matériel végétal
                                                             et animal notamment les transferts transfrontaliers.
                                                             Le développement de l’agriculture implique nécessairement le
                                                            recours aux facteurs d’intensification dont les semences et plants
                                                            performants mais celui-ci ne devrait pas avoir lieu au détriment
                                                            des variétés et races locales qui ont traversé les temps pour
                                                            donner des produits qui tirent le meilleur de leurs terroirs. Un
                                                            équilibre devrait être trouvé entre la conservation du patrimoine
                                                            génétique national et l’ouverture inévitable sur le patrimoine
                                                            universel que se partage l’ensemble de l’humanité.




                                                                                   Abdelkrim AOUAM
                                                                                   Chef Du BL Ouest




            MATE-GEF/PNUD Projet ALG97/G31 et MATE – KHELIF L. 1997 : « Synthèse de la stratégie algérienne
           d’utilisation de la diversité biologique »



                                                                                  Décembre   2019  N° 24  BNEDER-MAG 11
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