Page 10 - N°. 24 / DECEMBRE 2019
P. 10
CONTRIBUTION
L’EROSION GENETIQUE, LE DEFI CACHE DE L’AGRICULTURE ALGERIENNE
En agriculture l’érosion des sols est plus largement
évoquée que l’érosion génétique. Pourtant cette
dernière, moins visible et certainement moins
spectaculaire, peut avoir des répercussions plus
dramatiques sur la sécurité alimentaire des
populations.
Le phénomène d’érosion génétique est responsable de
la déperdition des spécificités de certaines espèces,
variétés ou cultivars voire de leur extinction pure et
simple. Pour le commun des consommateurs, il se
traduit par la disparition subite ou progressive des
étalages de produits agricoles habituellement
disponibles. Certains de ces produits sont même
représentatifs de terroirs. A titre d’exemple, au cours
des 3 dernières décennies au moins, des produits de
réputation régionale voire nationale ne sont plus
proposés à l’image de la pêche de Bousfer, la clémentine
de Misserghine, le raisin double fin « sinsault » et le
hamar Bouamar…Les figues, jadis diversifiées, sont
aujourd’hui réduites à quelques variétés uniformément
réparties à travers les différentes régions du pays.
Ce phénomène se manifeste aussi par l’érosion de la
diversité cultivée qui voit disparaitre les ressources
locales, naturellement adaptées, en faveur d’entités
intruses, imposées par l’homme ou par la force de la
nature…qui a horreur du vide.
A l’échelle mondiale, la FAO indique que
1
les ¾ de la diversité génétique variétale des plantes
cultivées ont disparu au cours du XXème siècle. Seules
douze espèces végétales et quatorze espèces animales assurent
l’essentiel de l’alimentation de la planète.
L’érosion génétique en milieu agricole peut être le résultat d’une évolution
naturelle ou de pratiques culturales imprudentes mais elle est de plus en plus
liée à l’invasion, souvent incontrôlée, de matériel végétal et animal exogène
dit amélioré au titre de l’intensification et de l’augmentation des rendements.
Cette invasion s’accompagne par une uniformisation génétique progressive
et, par substitution, par une réduction de la diversité génétique locale. Elle
peut aussi générer une pollution génétique par les processus biologiques
habituels (fécondation) ou par échanges de gènes avec la microflore
du sol et aboutir sur des situations problématiques lorsqu’il
s’agit d’OGM.
FAO : 2ème rapport dur l’état phylogénétique pour l’alimentation et l’agriculture – Octobre 2010
10 BNEDER-MAG N° 24 Décembre 2019